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Chronique et focus relatifs aux dérives managériales de notre temps

Selon l’Ipsos et Qualisocial, le baromètre du harcèlement au travail de 2022 révèle que près de trois salariés sur quatre considèrent que les situations de harcèlement au travail sont répandues et 62 % que ces situations le sont de plus en plus.
35 % des salariés signalent avoir été victimes de harcèlement au travail, dont 15 % à plusieurs reprises.
La dégradation des relations au travail est devenue un des maux de la décennie, un enjeu prioritaire dans le monde du travail.
Cette altération des relations de travail est passée de l’ombre aux prétoires… Mais, qu’en est-il devant les juges ?

° ’MORCEAUX’ CHOISIS…

Dans deux arrêts du 14 février 2024, pourvois n° 22-14.385 et n° 22-23.620, la Chambre sociale de la Cour de cassation s’est prononcée sur l’opportunité de sanctionner un management et d’autres comportements inappropriés.
Elle a ainsi indiqué que devait être sanctionné par une faute grave, dans la première affaire, un mode de gestion inapproprié de nature à impressionner et à nuire à la santé de ses subordonnés et dans la seconde, un comportement inadapté et harcelant.

° CONTEXTE DES SAISINES

Dans la première affaire, une salariée, directrice d’un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, est licenciée pour faute grave. L’employeur posait que les méthodes de gestion de la directrice consistent en des agissements répétés qui dégradent les conditions de travail de ses subordonnés, altèrent leur santé physique ou mentale et compromettent leur avenir professionnel.
La salariée conteste ce licenciement pour faute grave.

Dans la seconde affaire, une salariée, promue en qualité d’assistante marketing, a aussi été licenciée pour faute grave, en raison, selon son employeur, d’un comportement inadapté et harcelant qui se manifestait par des critiques, des moqueries, de la violence verbale et physique, une déstabilisation dans les relations professionnelles et une forme de manipulation allant au-delà de simples plaisanteries entre collègues. Tout comme pour la première affaire, la salariée conteste son licenciement.

° L’ANALYSE DE LA COUR DE CASSATION

Pour la première affaire, la Chambre sociale casse l’arrêt d’appel, car la cour d’appel, comme les juges du fond, n’a pas retenu la faute grave de la salariée. La Chambre sociale considère que la pratique par la salariée d’un mode de gestion inapproprié de nature à impressionner et nuire à la santé de ses subordonnés était de nature à caractériser un comportement qui rendait impossible son maintien dans l’entreprise. Dès lors, la faute grave est justifiée et doit être retenue à l’encontre de la salariée.

Pour la seconde affaire, la Chambre sociale approuve la cour d’appel, en rejetant le pourvoi de la salariée. La cour d’appel avait constaté que la salariée avait adopté un comportement se manifestant par des critiques, des moqueries, de la violence verbale et physique, une déstabilisation dans les relations professionnelles et une forme de manipulation allant au-delà de simples plaisanteries entre collègues.

De plus, la cour d’appel avait établi que l’attitude de la salariée produisait de la souffrance au travail : nonobstant l’ancienneté et l’absence d’antécédents disciplinaires de la salariée, la Chambre sociale confirme que le comportement de la salariée doit être sanctionné par une faute grave.

° ÉCLAIRAGES

Dès lors, la Chambre sociale de la Cour de cassation reste ferme face au management et autres comportements inappropriés, tel que le harcèlement, et sanctionne justement ceux-ci par la faute grave. Ainsi, elle ne tolère ni un mode de gestion inapproprié de nature à impressionner et à nuire à la santé des subordonnés, ni un comportement inadapté et harcelant à l’égard des subordonnés.

La Chambre sociale affine sa jurisprudence à la faveur des saisines et continue de construire un cadre protecteur des relations de travail.

Elle invite les salariés à continuer de dénoncer ces comportements fautifs et presse les employeurs à les sanctionner, s’ils ne veulent pas risquer d’engager, en raison de leur inaction, leur responsabilité pour manquement à leur obligation de sécurité.

° DROIT EN ACTIONS

Dans le contexte actuel où les salariés ont des difficultés à identifier avec précision les situations de harcèlement au travail, ces deux arrêts délivrent des indices précieux pour repérer les comportements inappropriés.
Il est essentiel que les salariés soient informés, afin d’analyser leur situation à l’aune de ces précisions jurisprudentielles.

Ces arrêts engendreront sans doute de nombreux contentieux destinés à stopper des relations de travail intenables.

Auteur, Jade EL MARBOUH, Pôle Service Juridique, Secteur Juridique National UNSA.

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